Alexis Degrenier, le rythme qui revient (toujours)

Le maître des oscillations présente son nouveau disque ce soir à Plateforme 10, à Lausanne. Brève évocation

Alexis Degrenier, c’est un musicien qui oscille, un bâtisseur de systèmes qui prennent le son comme un grand ramponneau (on dit aussi un culbuto): ça tournoie, ça s’en va et ça revient, et ça se relève toujours en vertu d’un centre de masse bien ancré en terre.

Il habite la région de Clermont-Ferrand, mais on le connaît bien ici pour avoir fondé, avec les Genevois Laurent Peter et Cyril Bondi, La Tène – majestueux trio qui revisite les modes médiévaux en les coulant dans l’esthétique contemporaine du drone.

Ou plutôt: qui fait de ces résonances et de ces répétitions anciennes l’objet essentiel de son attention. Dans La Tène, Alexis Degrenier manie la vielle à roue: il fallait le voir, en 2016 à la Cave 12 de Genève lors du vernissage de Vouerca/Fahy (le premier disque du projet), dodeliner comme en proie à une possession bénéfique. Cette transe lente, cette hypnose rugueuse était contagieuse.

Alexis Degrenier vient de sortir un album solo (il le présentera demain à Plateforme 10, à Lausanne): La Mort aura tes yeux, publié mi-novembre chez Murailles Music. Il y joue de tout: il décale des horloges, il cale des métronomes, il actionne des boîtes à bourdons, il tape sur une grosse caisse, sur des cloches, sur des cymbales, sur des poutres, il frotte des pierres.

Musique élémentaire à la précision diabolique

C’est une musique élémentaire (et surtout élémentale), aux antipodes de la virtuosité, mais d’une précision diabolique: chaque coup donné participe à l’élaboration d’une mécanique rythmique qui paraît de prime abord aller de guingois mais qui, insensiblement, tour après tour, se met à creuser un sillon profond qui vous avale et vous guide dans ses lents virages alternés. En termes de physique gravitationnelle, c’est tout à fait contre-intuitif, mais c’est bel et bien en pariant sur une vitesse de libération lente qu’Alexis Degrenier parvient à vous mettre en orbite. ■

Alexis Degrenier (première partie: Violeta García).

Lausanne, Plateforme 10, mercredi 7 décembre à 19h30. Organisation: Association du Salopard.