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«Utama», en attendant qu’il pleuve

Venu de Bolivie, ce premier long métrage se présente un peu trop comme la caricature d’un «film exotique» et manque de crédibilité

N. C.

Une ferme isolée face à l’immensité, un mode de vie traditionnel rude mais beau en voie de disparition: combien de fois a-t-on déjà vu ça, venu le plus souvent d’Asie mais parfois même de Suisse? Première réalisation d’un jeune cinéaste qui a débuté comme chef opérateur, aussitôt primé au Festival de Sundance, Utama ne déroge en rien au programme attendu. Au point qu’on se demande si le film a été réalisé pour un public local ou plutôt celui des festivals, friand d’exotisme? Pour nous, cela n’a pas suffi.

Tradition contre modernité

Pourtant, ils sont splendides, les paysages de l’Altiplano bolivien, en pleine cordillère des Andes! Sur ces terres arides, un couple d’Indiens quechuas âgés, Sisa et Virginio, tente de vivre comme il a toujours vécu. Mais alors que les sécheresses s’aggravent, Virginio sent arriver sa fin. Tombé malade, il le cache à sa femme. Le retour inopiné de leur petit-fils Clever, qui leur enjoint de venir rejoindre la famille à La Paz, leur accordera-t-il un répit? Une dernière fois, l’opposition entre traditions et modernité va s’exprimer, avant l’issue inéluctable.

Un espace imaginé peu crédible

«La pluie finira bien par venir», répète le vieux, par ailleurs d’une rigidité insupportable. En face, la vieille qui le supporte met un temps déraisonnable pour finir par manifester une émotion. Quant au garçon, qui range un peu vite sa moto, son portable et ses écouteurs pour aller faire brouter les lamas ou chercher de l’eau, il paraît plutôt de bonne volonté dans ces conditions! Changement climatique ou pas, c’est le film lui-même qui finit par paraître excessivement sec.

Tout à la composition méticuleuse de ses plans, Alejandro Loayza Grisi en oublie la crédibilité de son espace réimaginé. Une rivière – ou un canal? – qui s’arrête soudain, un conseil d’Indiens surgis de nulle part, un troupeau emmené à des kilomètres dans des rocailles au lieu d’une zone herbeuse aperçue au passage: c’est toute sa géographie qui devient douteuse, puis le récit qu’on commence à considérer avec méfiance. Décidément, un film qui prend la pose plutôt qu’il ne cherche à poser des questions pertinentes.

■ Utama, d’Alejandro Loayza Grisi (Bolivie, France, 2022), avec José Calcina, Luisa Quispe, Santos Choque, 1h27.

Culture

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2022-12-07T08:00:00.0000000Z

2022-12-07T08:00:00.0000000Z

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