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Des colis livrés par camionnette automatisée: Loxo y croit et dévoile son prototype à Berne

L’entreprise Loxo, basée à Berne, a dévoilé mardi une fourgonnette électrique de livraison autonome. Les premières commandes sont annoncées pour 2023. Pour rouler, la camionnette devra obtenir une autorisation spéciale

ANOUCH SEYDTAGHIA @Anouch

C’est une surprise. Alors que le développement des véhicules autonomes s’effectue principalement en Californie et en Arizona, via les géants Tesla, Waymo et Cruise, un nouvel acteur suisse pourrait faire sa place sur ce marché en devenir. Le conditionnel est de mise, pour deux raisons. D’abord, les promesses des véhicules autonomes peinent à être tenues, leur déploiement étant sans cesse repoussé pour des raisons de sécurité. Ensuite, l’entreprise Loxo, qui a présenté mardi son véhicule futuriste à Berne, n’avait jamais fait parler d’elle auparavant.

Et pourtant, à en croire ses responsables, le produit est au point. Baptisé Loxo Alpha, il s’agit d’une petite fourgonnette électrique et sans conducteur à bord. Le véhicule est autonome. Et au besoin, un opérateur humain peut en prendre le contrôle à distance. Mardi, sur la scène du Kursaal, Amin Amini, cofondateur et directeur de Loxo, a présenté le véhicule de manière dithyrambique. Pour lui, nous entrons «dans une nouvelle ère pour la livraison par des véhicules autonomes».

Radars et caméras

La camionnette futuriste est équipée «des capteurs et des logiciels les plus modernes», assure Amin Amini. Le modèle Alpha profite d’un capteur lidar «le meilleur jamais vu sur un véhicule de livraison, capable de détecter des objets aux alentours et de prédire leur vitesse et leur comportement». Des radars et des caméras en haute résolution sont aussi installés sur le véhicule, permettant une vue à 360 degrés, ainsi que la détection d’objets proches du sol.

Le modèle, dont un prototype a été montré à Berne sur scène, mesure 3,4 mètres de long, 1,5 mètre de large et 1,8 mètre de haut. Il dispose de plusieurs compartiments totalisant 2600 litres de volume et pouvant supporter une charge totale de 320 kg. Le véhicule peut se déplacer jusqu’à une vitesse de 30 km/h.

«Des atouts»

Lors de sa présentation, Amin Amini a donné l’exemple d’un père de famille devant commander en urgence le soir des couches pour son nouveau-né. Ou un colis qu’une femme, de retour de son travail le soir, doit impérativement recevoir rapidement. N’est-ce pas utopique, alors que cela fait des années que les véhicules autonomes sont annoncés? «Nous sommes certains que ces services seront proposés, et que la livraison s’effectuera via de tels véhicules, assure Amin Amini. Ce ne sera pas pour tout de suite, mais nous estimons que nous avons des atouts.»

Côté calendrier, Loxo ouvrira des précommandes pour son véhicule en 2023. Amin Amini ne veut pour l’heure articuler aucun prix. «Nous destinons notre véhicule à des entreprises qui veulent le tester. La phase commerciale viendra plus tard. Quand? Je ne sais pas encore.»

Le directeur l’assure, le modèle Alpha est très suisse: «Nous travaillons en étroite collaboration avec la Haute Ecole d’ingénierie de Fribourg, nous avons des partenaires techniques en Suisse alémanique, nous achetons les technologies en partie à l’étranger et nous assemblons nous-même le véhicule à Berne.» Loxo, qui compte selon son directeur «moins de dix employés», a été fondé il y a deux ans. La société ne dit pas combien elle a levé lors de son premier tour de financement, alors que le deuxième est en cours. La société de capital-risque zurichoise Serpentine Ventures a participé au financement initial.

Il y a les questions techniques et financières. Il y a aussi la question juridique. Pour l’heure, le véhicule de Loxo ne peut pas rouler en Suisse. «C’est vrai, il nous faut une autorisation spéciale, mais la Confédération en a délivré par le passé et nous pourrons en obtenir, assure Amin Amini. De plus, les données récoltées durant les tests seront utiles aux autorités.»

«Nous destinons notre véhicule à des entreprises qui veulent le tester. La phase commerciale viendra plus tard. Quand? Je ne sais pas encore»

AMIN AMINI, COFONDATEUR ET DIRECTEUR DE LOXO

Loi en cours de révision

Pour le moment, la législation suisse n’autorise pas la circulation de véhicules automatisés de niveau 4 et de niveau 5. Le niveau 4 permet au conducteur de ne pas toujours être concentré sur la route, mais il doit pouvoir reprendre le contrôle en cas de situation difficile. Le niveau 5 implique une automatisation totale, sans aucune intervention humaine. Le véhicule de Loxo, contrôlé à distance, s’apparente au niveau 4. Ces dernières années, une dizaine de tests ont été effectués en Suisse, que ce soit par Swisscom, La Poste, CarPostal ou encore les Transports publics fribourgeois. Il s’agissait principalement de navettes autonomes et de mini-véhicules de livraison.

L’Office fédéral des routes a déjà publié plusieurs rapports sur les véhicules autonomes. Dans une étude datée du 31 décembre 2021, on lit notamment que «les véhicules hautement ou entièrement automatisés mettront des décennies à s’imposer dans le parc automobile» et qu’ils «sont susceptibles de générer un trafic supplémentaire considérable et de rendre le trafic mixte dangereux». Même si le rapport parle bien sûr aussi des opportunités, ses auteurs appellent à la plus grande prudence concernant les prédictions, notant qu’«il n’est actuellement pas possible de tirer des conclusions fiables sur les conséquences de la conduite automatisée; les conclusions présentées dans le rapport de recherche sont certes fondées, mais n’ont qu’une valeur d’estimations».

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fr-ch

2022-12-07T08:00:00.0000000Z

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