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Le rôle clé des communes et des caisses de pension

Les communes suisses manquent de moyens financiers et humains pour réaliser leurs projets de transition énergétique. Les institutions de prévoyance peuvent financer ces infrastructures

CÉSAR PIDOUX ASSOCIÉ CHEZ GEFISWISS

Les premières manquent de moyens financiers et humains pour réaliser les infrastructures nécessaires à la transition énergétique, les secondes peuvent les financer, explique César Pidoux associé chez Gefiswiss.

C’est désormais une évidence. La Suisse n’a pas fait assez pour sa transition énergétique au cours des dernières années. La dépendance de notre pays aux énergies fossiles et à la production d’électricité provenant de nos voisins menace désormais la qualité de vie de tout un chacun ainsi que la compétitivité de notre économie.

La prise de conscience salutaire de ces derniers mois engendre plus d’investissements en faveur de la transition énergétique que des années de mesures incitatives. Appelons cela l’intelligence du porte-monnaie.

Dans son document «Perspectives Energétiques 2050+», la Confédération estimait en 2020 à plus de 1500 milliards de francs les besoins d’investissement d’ici à 2050 pour atteindre les objectifs de neutralité carbone.

Si une grande partie de ces montants sera financée par les acteurs privés (propriétaires immobiliers, industries, propriétaires de véhicules), les communes doivent également devenir des acteurs majeurs de la transition énergétique. Ceci passe notamment par la réalisation d’installations photovoltaïques, d’installations de biogaz, ou de réseaux de chaleur à distance. En 2014, l’Association suisse du chauffage à distance (Ascad) estimait les besoins d’investissement pour les projets offrant un rendement suffisant à 50 milliards de francs.

Côté pile: les besoins des communes

Ainsi, par exemple, Genève finance son réseau GeniLac, d’un coût d’environ 800 millions de francs. Mais la plupart des communes, bien qu’ayant des besoins nettement plus modestes, ne disposent pas des ressources financières ou humaines pour réaliser leurs propres projets, qui se chiffrent vite en millions. Et vu la grande fragmentation de ces projets, impossible d’émettre des obligations vertes.

Encore peu utilisé à ce jour, un outil à disposition des communes est la création du partenariat public-privé (PPP). Particulièrement pertinent pour des infrastructures énergétiques, le PPP permet à une commune de financer un projet sans trop grever le budget communal. Surtout, grâce à sa participation dans la société d’exploitation, la commune conserve un certain contrôle sur l’exploitation des infrastructures servant ses administrés.

Mais pour réaliser un bon PPP, il faut non seulement un projet offrant un rendement suffisant, mais également un partenaire apportant les compétences et solutions techniques qui souvent manquent aux communes.

Côté face: les besoins des institutions de prévoyance

En 2021 est entrée en vigueur une modification importante des règles de placement des institutions de prévoyance (OPP 2). Parmi les changements, l’inscription des infrastructures comme une classe d’actifs à part entière. La volonté exprimée du Conseil fédéral et du parlement était de favoriser le financement d’infrastructures durables en Suisse par les caisses de pension.

Pourtant, à l’heure actuelle, rares sont les exemples concrets d’investissement de ces dernières dans des projets en Suisse.

La raison souvent invoquée est qu’il n’y aurait pas, en Suisse, de besoin de financement pour des projets d’infrastructures. Ce constat erroné provient du fait que les investisseurs ne cherchent que, par habitude, besoin de sécurité et simplification, à investir dans des projets internationaux de plusieurs centaines de millions regroupant nombre d’investisseurs. Fréquents à l’étranger, ceux-ci sont effectivement rares en Suisse.

Pourtant, bien que de taille plus modeste, les projets locaux offrent de nombreux avantages: un cadre légal sûr, des retombées économiques locales via les entreprises appelées à réaliser ces travaux, des recettes supplémentaires pour les communes, des réductions des émissions de CO2, le renforcement de notre indépendance énergétique. Mais avant tout, ces investissements durables offrent des rendements réguliers sur le long terme.

Il est clair que la plupart des institutions de prévoyance ne disposent pas des compétences internes pour développer et exploiter une infrastructure en partenariat public-privé avec une collectivité.

Mais elles peuvent désormais investir aisément au travers de fonds infrastructures qui se focalisent sur ce type d’investissements, sont à même de réaliser des partenariats public-privé et qui répondent aux exigences élevées de leurs investisseurs.

Il est à parier que le développement de l’offre de financement pour des partenariats public-privé engendrera un intérêt croissant de la part des communes et donc un accroissement des investissements dans les infrastructures énergétiques durables en Suisse.

Lundi Finance

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2022-09-26T07:00:00.0000000Z

2022-09-26T07:00:00.0000000Z

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