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Contre son parti, Alain Berset remporte gros

Le ministre socialiste engrange vraisemblablement son succès le plus marquant. Il utilise l’étroitesse du score pour avertir la droite sur la prévoyance professionnelle

P. B.

C’est le système qui le veut, c’est le jeu. Un conseiller fédéral doit parfois lutter contre sa famille politique, encore plus fréquemment lorsqu’il appartient à l’un des deux pôles, la gauche ou l’UDC. Ueli Maurer en sait quelque chose. Alain Berset aussi. En promouvant la réforme de l’AVS et la hausse de l’âge de la retraite des femmes, le socialiste a dû jouer cette partition dans un dossier capital, composante historique de l’ADN de son parti. Au final, il remporte probablement sa plus grande victoire politique, avec la droite et les milieux économiques, ses contradicteurs naturels. Au moment de réagir devant la presse, le ministre s’est attaché à calmer le jeu. «Le Conseil fédéral prend acte du résultat avec modestie. Il nous faut entendre l’avis de la minorité. Il s’agit d’un message adressé au parlement pour ses prochains travaux.» Interrogé sur la lutte contre son parti, il fait valoir que «les sentiments d’un conseiller fédéral ne doivent pas dominer l’agenda. Nous avons eu plusieurs échecs ces dernières années et avons aujourd’hui fait un pas important.»

Les Chambres sont en train de réviser le deuxième pilier des retraites, la prévoyance professionnelle (LPP). La droite remet en question le compromis délivré par Alain Berset, le gouvernement, l’Union patronale suisse et les syndicats. «Le projet du Conseil fédéral et des partenaires sociaux améliore la situation des femmes. Le résultat d’aujourd’hui sonne comme un avertissement.»

Si Alain Berset a mis l’accent sur la prochaine étape du processus, certains parlementaires n’en ont pas moins commenté son engagement dans la campagne en faveur de la hausse de l’âge de la retraite des femmes. Au PS, son «rival historique» Pierre-Yves Maillard n’est pas tendre. «Une augmentation de l’âge de la retraite des femmes dans ces conditions n’améliore pas le bilan du Conseil fédéral, et pas non plus celui du conseiller fédéral en charge du dossier.» Le ton est donné. L’écologiste Léonore Porchet grince aussi des dents. «La droite a agité les peurs sur l’avenir de l’AVS, Alain Berset aussi. Il restera dans l’histoire avec cette étiquette-là: le ministre socialiste qui a augmenté l’âge de la retraite des femmes sans améliorer les rentes sur le long terme. Les compensations sont, comme leur nom l’indique, des compensations. Rien de plus.»

Les deux Vaudois n’accablent pas complètement le conseiller fédéral fribourgeois: celui-ci défendait un projet sorti d’un collège gouvernemental marqué à droite.

Eloges chez les bourgeois

«Il est resté respectueux des institutions, très factuel et objectif dans les débats» VINCENT MAITRE, CONSEILLER NATIONAL ET VICE-PRÉSIDENT DU CENTRE

C’est justement dans le camp bourgeois, chez ses alliés de circonstance, qu’Alain Berset récolte les avis les plus favorables. «Il a été tout à fait loyal, a fait son travail dans la campagne», salue Vincent Maitre, conseiller national et vice-président du Centre. «En tant que partisan du oui, j’aurais peutêtre aimé le voir plus combatif, mais il est resté respectueux des institutions, très factuel et objectif dans les débats.» Pour le Genevois, Alain Berset «est monté en puissance en gérant bien la pandémie de Covid-19, et cette victoire dans l’AVS vaut son pesant d’or, puisque personne n’y était parvenu depuis un quart de siècle.» La sénatrice libérale-radicale Johanna Gapany (FR) apprécie également. «La question du parti du ministre qui défend le projet ne compte pas tellement. Il faut se placer au-dessus de cela. Il faut un ministre engagé et il l’a fait. Je n’ai rien à lui reprocher.»

Votations Fédérales

fr-ch

2022-09-26T07:00:00.0000000Z

2022-09-26T07:00:00.0000000Z

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