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Pratique et limites de la Personne de confiance

MARTINE GAUDERON ALEC, FONDATRICE DU CABINET DE RECRUTEMENT ALEC ALLAN ET ASSOCIÉS

Dans son arrêt du 9 mai 2012, le Tribunal fédéral (TF) invite les entreprises à nommer une Personne de confiance (PCE) dans le but de prévenir les conflits internes et contribuer à protéger la santé des travailleurs, notamment la santé psychique. Il donne également la possibilité aux offices cantonaux de l’inspection et des relations du travail d’imposer une PCE à un employeur pour renforcer la prévention des risques psycho-sociaux.

Chaque entreprise décide de mettre en place un dispositif visant à garantir la santé et la sécurité de ses employés en fonction de ses spécificités. Certaines n’ont pas attendu l’arrêt du TF de 2012 pour désigner une Personne de confiance (PCE) afin de prévenir et gérer les risques psycho-sociaux en entreprise en offrant ainsi à leurs employés un outil de gestion des conflits.

Dans le monde de l’entreprise, la PCE est un professionnel au bénéfice d’une formation spécifique, désigné d’avance, sans rapport hiérarchique et auquel les salariés concernés peuvent s’adresser confidentiellement en cas de conflit. Il est essentiel que cette personne soit digne de confiance, crédible et impartiale. Elle offre une écoute de qualité, soutient les employés en difficulté, les conseille et les renseigne sur les démarches possibles mais aussi sur les conséquences qui en découlent. Traiter et prévenir les conflits requiert toujours une intervention rapide et impartiale.

Dix ans plus tard, ce dispositif d’aide et de prévention semble encore assez peu connu. Pourquoi? La PCE représente pourtant bien des avantages. D’abord, le collaborateur se sent respecté. La Personne de confiance est aussi formée et par le questionnement et l’écoute active permet à celui qui est en situation de difficulté de prendre conscience de la situation qu’il est en train de vivre, de la déposer, la relativiser ou la résoudre. Lors d’une situation de souffrance grave, médicale ou psychologique, la PCE peut guider vers un réseau d’experts qui prendront le relais. Bien introduit, ce processus contribue également à la bonne image d’employeur soucieux de la santé de ses collaborateurs.

Il existe bien d’autres avantages, mais aussi certaines limites. La PCE n’a pas de réels pouvoirs si ce n’est celui de l’écoute attentive. Elle ne remplacera toutefois pas l’engagement du management à offrir les meilleures conditions de travail possibles ou à faire changer les choses. La PCE est un dispositif qui recouvre des notions qui ne sont pas toujours bien comprises ou assimilées. Elle oblige les intervenants à sortir de leur zone de confort et à relayer certaines problématiques à la hiérarchie. C’est aussi un dispositif qui a un coût certain et qui est considéré comme une solution onéreuse. Par ailleurs, les entreprises du privé ne sont pas forcément intéressées de voir leurs problèmes exposés à quelqu’un d’externe.

Il est essentiel d’instaurer un climat de confiance au sein de l’entreprise et de tout entreprendre pour prévenir et gérer les risques psycho-sociaux. Adopter un style bienveillant, être sensibles à la bonne intégration des nouveaux collaborateurs, préparer les équipes à l’arrivée d’un nouveau manager ou de nouveaux collègues, permettre aux gens de faire connaissance, être attentifs à l’onboarding permet de prévenir des situations problématiques, cela tout particulièrement lors de réorganisations et du changement de management. Cela étant, il est temps de changer de paradigme et d’utiliser le processus de la PCE comme un outil offert aux ressources humaines et aux collaborateurs pour une amélioration de la qualité de vie, avec un objectif sincère.

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2022-07-01T07:00:00.0000000Z

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