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Les start-up suisses ont levé 3 milliards en 2021

INNOVATION Les jeunes pousses helvétiques ont attiré plus de 3 milliards de francs l’an dernier. Un montant record, en hausse de 44% sur un an. Seules les levées de fonds de montants compris entre 10 et 20 millions de francs sont devenues plus difficiles

ALINE BASSIN @BassinAline

Les jeunes pousses helvétiques continuent leur croissance, d’après un rapport sur le capital-risque publié hier: avec 3,1 milliards levés l’an passé, la progression est de 44% par rapport à 2020 – Zurich et Vaud se révélant les pépinières les plus fertiles. La levée de fonds la plus importante a été réalisée par l’entreprise Wefox, spécialisée dans les technologies pour les assurances, et se monte à 584 millions. Seule ombre au tableau: la difficulté relative à décrocher des montants compris entre 10 et 20 millions.

«Il y a beaucoup d’argent sur le marché.» Coauteur du rapport sur le capital-risque en Suisse publié jeudi, Stefan Kyora qui dirige également le site d’information spécialisé Startupticker.ch résume bien le climat qui a prévalu en 2021 dans le milieu des jeunes pousses helvétiques.

A l’exception d’un petit coup d’arrêt observé en 2020, les montants engrangés par les entrepreneurs en Suisse croissent d’ailleurs à un rythme soutenu depuis quelques années. Alors que le seuil du milliard de francs levé avait été atteint il y a trois ans à peine, un montant record de 3,1 milliards a été obtenu l’année dernière par les jeunes entreprises suisses à caractère technologique, selon les estimations de Startupticker et de l’Association suisse des investisseurs en capital et de financement (SECA). Sur un an, la progression est de 44%. L’accélération de la transformation numérique et l’attrait des sciences de la vie conjugués à une forte disponibilité de capital expliquent en grande partie cette forte hausse.

Tous deux détenteurs d’une haute école polytechnique fédérale sur leur territoire, les cantons de Zurich et de Vaud confirment leur statut de poids lourds de l’innovation, avec des investissements de respectivement 1,3 milliard de francs (+102,1%) et 605 millions (+47,8%). Selon les auteurs du rapport, l’activité croissante des fonds de capital-risque suisses n’est pas étrangère à ces bons chiffres. Ils ont recensé 35 nouveaux véhicules d’investissement pendant la période sous revue.

Manque de financement intermédiaire

L’engouement des investisseurs pour les jeunes entreprises technologiques n’est de loin pas une spécificité suisse. En novembre, la société d’investissement britannique Atomico, qui publie chaque année avec des partenaires un rapport sur l’état de la tech européenne, estimait à 100 milliards de dollars le montant total des investissements consentis en Europe en 2021 dans ce secteur.

Dix fois plus que le niveau observé en 2015 lors du premier recensement effectué.

Si le financement initial ne paraît plus représenter un problème en Suisse, les données relayées par le Swiss Venture Capital Report font état d’une plus grande difficulté à trouver des investisseurs dans une fourchette comprise entre 10 et 20 millions de francs. «Alors qu’il est plus facile désormais d’obtenir des fonds de lancement, trouver des fonds à ce stade demande actuellement plus d’efforts, remarque Thomas Heimann, secrétaire général adjoint de la SECA. En revanche, une fois que des prototypes sont développés et que le modèle économique est confirmé, les investisseurs étrangers entrent en jeu et des financements sont trouvés.»

Cinq levées de fonds supérieures à 100 millions de francs ont ainsi été réalisées l’an dernier. La plus élevée a été opérée par Wefox. Active dans les technologies pour les assurances et opérant principalement depuis l’Allemagne, cette start-up zurichoise a levé 584 millions de francs.

Loin derrière, la société vaudoise Nexthink est elle aussi entrée dans la ligue suisse des licornes – start-up valorisées à plus d’un milliard de francs – grâce à un afflux d’argent de 162 millions de francs. Spécialisée dans les informations financières liées aux start-up, la société Dealroom recensait en novembre dernier neuf jeunes pousses à une corne sur sol helvétique en 2021. A titre de comparaison, à la même époque, elle en identifiait 55 en Allemagne et 22 en France.

Les trois autres «tours de table» devisés à plus de 100 millions de francs sont à mettre à l’actif d’entreprises des sciences de la vie. Comme Wefox et Nexthink, elles restent encore bien en deçà des montants stratosphériques levés au niveau continental, aucune pousse suisse ne figurant dans le top 10 européen des levées de fonds. Le record a été établi par l’entreprise suédoise Nothvolt qui développe des batteries pour voitures électriques. En juin 2021, elle a levé 2,75 milliards de dollars.

Nombreuses acquisitions

Motivées par la liquidité du marché, onze entreprises helvétiques ont décidé de se risquer sur les marchés publics, à l’image des vaudoises Sophia Genetics et Astrocast. Cotée au Nasdaq, la première, active dans la médecine de précision, a capté 234 millions de dollars. Le producteur de petits satellites a lui engrangé 45 millions de francs à la bourse d’Oslo. De l’autre côté de la Sarine, c’est l’entrée en bourse remarquée de On Shoes, société soutenue par Roger Federer qui a marqué les esprits. Cotée au New York Stock Exchange, l’entreprise pèse près de huit milliards de dollars.

Cinquante-cinq autres entreprises ont, elles, été rachetées. C’est par exemple le cas d’une autre vaudoise, Green Motion. Ce pionnier des bornes de recharge pour voitures électriques a été racheté par l’américain Eaton pour un montant non communiqué. Une vente, c’est aussi l’espoir que caressait la start-up vaudoise Bestmile. L’opération n’ayant pas pu se concrétiser, les deux cofondateurs de cette société ont dû se résigner à cesser leurs activités. Ils ont déjà rebondi à des fonctions élevées dans l’économie suisse, le signe, certainement, que la vision de l’échec a évolué sous nos latitudes.

Le dynamisme du microcosme des start-up, à caractère technologique, ne représente que la pointe de l’iceberg d’un intérêt croissant pour l’entrepreneuriat en Suisse. En 2021, 50 545 entreprises y ont été créées, selon des données fournies par la société IFJ. Ce chiffre est en hausse de 8% par rapport à 2020 qui représentait déjà une année record.

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2022-01-28T08:00:00.0000000Z

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